EDITH TARTAR GODDET : La toute-puissance à l'école

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Photo d'Edith Tartar-Goddet
A l'occasion de la sortie de l'ouvrage La toute-puissance à l'école, nous avons posé quelques questions à Edith Tartar Goddet, l'auteure, concernant ce phénomène qui peut toucher enfants, parents et enseignants.

A découvrir !

1. Qu’est-ce que la toute-puissance et qui concerne-t-elle à l’école ? 

La toute-puissance est une manière d’être, basée sur la certitude de tout savoir, de tout pouvoir faire et d’être en tous points supérieur aux autres. Sur le plan psychiatrique, elle se nomme « perversion narcissique ». Les personnes qui en sont atteintes sont appelées « enfant ou adulte roi ». A l’école, la toute-puissance affecte aussi bien les enfants / élèves, les professionnels que les parents. Ce mode de fonctionnement rend difficile les apprentissages, les relations entre collègues et avec les parents, la remise en question des pratiques professionnelles... 


2. La toute-puissance est-elle un phénomène nouveau en milieu scolaire ? 

Ce phénomène n’est pas récent. J’en entends parler dans le cadre des formations que j’anime depuis le début des années 2000. Mais à ce moment là, il évoluait à bas bruit et affectait peu de personnes. Aujourd’hui il est beaucoup plus fréquent de rencontrer au cours de l’année scolaire plusieurs élèves, collègues et parents qui fonctionnent suivant ce modèle. La toute-puissance est aussi visible dans d’autres milieux professionnels et bien sûr dans le milieu familial. La toute-puissance est un phénomène sociétal. Les médias font la promotion d’une manière d’être centrée sur sa seule personne, fondée sur la satisfaction immédiate de tous ses désirs… Lorsque ces manières d’être sont prises « au pied de la lettre », cela donne un individu en toute puissance. 


3. Les acteurs et les victimes de la toute-puissance ont-ils conscience qu’ils sont confrontés à un tel phénomène ? 

Il est rare que nous sachions nommer avec justesse cette manière d’être, y compris lorsque nous en sommes témoins. L’ouvrage met en évidence, dans sa première partie, un grand nombre des caractéristiques de la toute-puissance pour que chacun arrive à la débusquer là où elle est. Les acteurs concernés n’ont aucune conscience qu’ils fonctionnent dans la toute-puissance puisqu’ils ont la certitude qu’ils sont parfaits et qu’ils sont appréciés de tous. De plus, ils sont incapables de se remettre en question et de se percevoir tels qu’ils sont décrits par leurs interlocuteurs. De leur côté, les victimes mettent beaucoup de temps à s’apercevoir qu’elles sont sous l’emprise d’une personne en toute-puissance. Lorsqu’elles prennent conscience que la relation avec cette personne est devenue insupportable, elles sont souvent empêtrées dans cette relation toxique qui dure depuis longtemps et elles vont avoir du mal à s’en dégager. 


4. Comment votre ouvrage permet-il de faire face à la toute-puissance ? 

C’est un ouvrage pratique s’appuyant sur de nombreux exercices et centré sur la qualité du lien relationnel à construire avec l’enfant / élève, le collègue, le parent. Faire face à la toute-puissance c’est d’abord la dépister chez les autres mais aussi chez soi-même ; c’est aussi repérer les fonctionnements professionnels qui, dans l’institution scolaire, favorisent cette manière d’être. Le livre aborde ces aspects dans sa première partie. Il propose ensuite aux adultes des pistes relationnelles pour aider les enfants qui fonctionnent dans la toute-puissance à quitter cette manière d’être. Mais au lieu de se centrer sur les comportements de toute-puissance afin de les faire disparaître, l’ouvrage propose d’apporter à ce type d’enfant ce qui lui manque pour devenir un enfant capable de se poser des questions, de ressentir et de penser, de composer avec l’autre, etc…

Concernant les collègues ou les parents qui fonctionnent dans la toute-puissance, l’ouvrage ne propose pas aux adultes des pistes pour faire cesser leurs comportements ou les faire changer, car cette tache relève de la psychopathologie. Il propose plutôt d’apprendre à prendre soin de soi et des autres, pour se protéger et les protéger des agissements néfastes qu’ils subissent.