Interview de Christian Poslaniec : "Premiers rôles"

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Photo de l'auteur Christian Poslaniec
Sur la collection "Premiers rôles".

1. Vous êtes directeur de la nouvelle collection « Premiers rôles ». Quelles sont les caractéristiques de cette collection ?

C’est une collection de pièces de théâtres destinées à être jouées par des enfants, à partir de 7 - 8 ans. Elles sont écrites spécialement pour cela par des auteurs contemporains de théâtre. Toutefois, c’est une approche médiatisée par des adultes, notamment des enseignants, qui est prévue, et pour chaque pièce, deux outils sont proposés : en premier lieu, un texte permettant une approche littéraire avec des activités intégrées, rédigé par un(e) spécialiste ; en second lieu, une approche scénographique rédigée par une professionnelle du spectacle, permettant aux médiateurs d’élaborer leur propre mise en scène.

 

2. Quels « plus » apporte-elle par rapport aux autres collections de théâtre existantes ?

Je n’aime pas trop cette approche concurrentielle avec les autres collections que je connais bien et estime, pour la plupart. Disons que je fais une offre différente en croisant deux itinéraires de mon histoire personnelle : celui de l’écrivain de théâtre et celui du pédagogue. Et si je me suis investi personnellement en écrivant les pièces d’un des volumes et en réalisant l’approche littéraire d’une pièce de Jean-Gabriel Nordmann, c’était justement pour vérifier s’il ne s’agissait pas d’une gageure et si je pouvais demander à des écrivains et à des pédagogues de se lancer dans l’aventure. De ce point de vue, le pari est réussi et d’autres écrivains de théâtre sont déjà en état de création, pour les volumes à venir. Je pense aussi qu’une des originalités de cette collection, c’est la publication, dans un même volume, de deux pièces, dont l’une est l’adaptation fidèle d’un conte classique, alors que l’autre est une création totale. Je sais, pour avoir été enseignant, qu’on oscille toujours entre initier les enfants au patrimoine et les étonner en leur faisant découvrir la création contemporaine. J’ai voulu que les deux soient possibles, d’autant que j’estime ces deux démarches complémentaires.

 

3. Votre livre présente donc une création à partir d’un conte traditionnel et une pièce originale.

=> Pourquoi avoir choisi « Le Petit chaperon rouge » ?

En raison de la difficulté du projet. Récrire un texte classique sous une autre forme littéraire, c’est toujours un pari et une contrainte à la manière de celles que l’Oulipo se donnait. En l’occurrence, Le petit chaperon rouge est le conte patrimonial le plus connu, celui qui est également le plus adapté et récrit, mais c’est aussi le conte le plus bref. Je parle naturellement du conte de Perrault, pas de ce que les frères Grimm en ont fait, ni de la version mâtinée qu’on croit en général être le conte. En outre, par ses moralités, Perrault en donne lui-même une interprétation avec laquelle on peut ne pas être d’accord mais qu’il faut prendre en compte.

=> Présentez-nous votre pièce originale, « Les explo-rateurs »

Cette pièce repose sur une série d’imbroglios, d’une part, des événements improbables, d’autre part ; et la confrontation des deux permet d’avancer plusieurs interprétations. En voici brièvement la trame : des enfants sont en classe de neige. Trois d’entre eux trouvent un moyen d’aller explorer la Guyane, rêvant de rencontrer des animaux sauvages, des Indiens, et de voir la fusée Ariane. Or, les animaux qu’ils voient sont des enfants déguisés, car c’est carnaval. Enfants qui se révèlent des Indiens, mais vivent exactement comme leurs camarades « métros ». Et la fusée Ariane, ils n’en voient que la fumée. Pendant ce temps, leurs camarades restés en classe de neige voient des vrais animaux échappés d’un cirque, rencontrent des Indiens des Indes et de Guyane, et voient les multiples fusées d’un feu d’artifice. Et comme les deux groupes communiquent entre eux par SMS, les parallélismes qui s’établissent créent de nombreux effets comiques, mais donnent aussi à penser.

 

4. Si je suis enseignant, mais que je n’ai jamais fait de théâtre, est-ce difficile de monter un projet ?

Je ne voudrais pas être démagogue : monter une pièce de théâtre ne se fait jamais en claquant des doigts ; c’est un vrai travail qui demande de la détermination et une bonne organisation. Mais qui est source de nombreux plaisirs tant pour les enseignants que pour leurs élèves. J’ai rendu compte, l’an dernier, d’une expérience théâtrale, dans Dix animations lecture au cycle 3 (Retz). On voit bien comment cela se construit, quelles sont les étapes. J’avais cela présent à l’esprit en concevant cette collection. Manifestement, faire du théâtre, ce n’est pas apprendre un texte et le jouer. C’est surtout pénétrer peu à peu les différentes strates du texte, voir comment elles s’articulent et comment elles peuvent conduire à des interprétations différentes. Or, de ce point de vue, je pense que les textes pour les approches littéraires et théâtrales peuvent être d’une aide précieuse, y compris pour quelqu’un qui n’a jamais fait de théâtre.